Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (12/13)

Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (12/13)

Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (12/13) 1094 618 Le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée

Nous poursuivons la mise en ligne des intervenants du troisième webinaire dédié aux ressources en Méditerranée. La thématique que nous avons décidé d’explorer concerne un sujet très problématique en Méditerranée, celui des déchets.

« Les déchets, une ressource ? » Si l’affirmation n’est pas immédiatement évidente, nous allons voir pourquoi et comment les intervenants de ce troisième webinaire, qui s’est tenu le 3 juin dernier, soutiennent cette position.

Pour mémoire, le webinaire du 3 juin est le troisième d’une série de quatre, destinés à traiter de la rareté de ressources emblématiques de la Méditerranée, mais aussi des solutions, traditionnelles comme innovantes, qui s’appliquent à la recherche, à la conservation et à une gestion optimisée de celles-ci.

Voici la douzième contribution :

Intervention de Flore Desal : Chargée de développement, Les Alchimistes

Bonjour à tous, je suis Flore Desal et je travaille chez Les Alchimistes en tant que chargée de développement.

Les Alchimistes est une entreprise qui collecte et valorise les biodéchets en ville, et nous disposons d’un agrément ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale), ce qui signifie que nous sommes reconnus d’utilité sociale et solidaire. Nous sommes présents sur 8 territoires, à Marseille, en Ile de France, à Toulon, à Lille, à Nantes, à Toulouse, à Lyon et à la Réunion.

Concrètement, nous avons 3 missions. D’abord, nous faisons de la sensibilisation pour promouvoir un changement de fond de la société. Ensuite, nous collectons les biodéchets localement à vélo ou en camion. Enfin, nous produisons du compost sur nos plateformes de production proche des villes. L’idée, c’est vraiment de limiter la distance moyenne parcourue par les déchets et d’ouvrir nos sites à la visite pour que les citoyens comprennent l’importance de leur geste de tri. Enfin, le compost est ensuite redistribué aux personnes participant aux gestes de tri.

À ce jour, cela fait 4 ans que nous existons, nous sommes approximativement 60 employés sur 8 territoires avec une capacité de traitement de 5000 tonnes de biodéchets par an. Vous le voyez à l’écran (diapo page 4), la valorisation des biodéchets est une obligation réglementaire et l’échéance de 2023 arrive à grand pas. De notre côté, on promeut en priorité le compostage comme type de valorisation pour permettre le retour de la matière organique à la terre, ce qui est une manière de nourrir les sols, de les fertiliser à la fois pour l’agriculture mais aussi pour la biodiversité. Avoir des sols nourris permet aussi de capter le CO2 présent dans l’atmosphère, ce qui contribue aussi à lutter contre le réchauffement climatique. Nous ce que nous faisons essentiellement, c’est de la collecte et du traitement des déchets et nos clients actuellement ce sont principalement des acteurs privés comme des hôtels, la restauration commerciale, la restauration collective, des fleuristes… Mais de plus en plus, on commence à s’adresser aux collectivités pour essayer de toucher les ménages.

À chaque fois que l’on déploie une collecte, il y a une part de sensibilisation qui l’accompagne, à la fois sur l’importance du geste de tri, sur la réglementation mais aussi sur la vie des sols et l’intérêt du compost. Ensuite, notre tarification est complètement transparente puisque nos partenaires sont débités en fonction de la quantité de déchets collectés, du nombre de bacs levés et de la qualité du tri. Nous disposons d’un système d’information que nous partageons avec eux. Par la suite, nous vendons notre compost sous différentes formes soit en vrac, en big bag, soit on peut le proposer en sachets. Le coût du traitement à la tonne dépend de la qualité du tri, mais varie globalement entre 120 et 200€. Si la qualité du tri est excellente, nous n’avons quasiment rien à faire, mais dans d’autres cas, certains bac doivent subir un traitement supplémentaire, ce qui augmente le coût de traitement et le prix final.

Sur cette slide (diapo page 6), on peut voir à quoi ressemble un site de production de compost. Notre idée vise à ce soient des sites micro-industriels, ce qui représente pour nous la meilleure solution après le compostage de proximité. Nous savons pertinemment qu’il n’est pas toujours possible d’avoir un composteur dans son jardin ou d’avoir des personnes qui animent des composteurs partagés. Nous proposons une solution qui vient répondre à cette problématique. Nous avons donc des sites micro-industriels qui peuvent traiter de 700 et jusqu’à 5000 tonnes, tout en étant situés de 10 à 30 kilomètres des villes en fonction du territoire. L’idée, c’est aussi d’être les acteurs de l’acheminement des bacs, car nous faisons de la collecte par échange de bacs. À l’écran, vous pouvez observer sur la deuxième photo (diapo page 6) la table de tri. Tous les bacs que l’on collecte sont pesés, puis il y a un surtri qui est opéré par nos opérateurs. Ce surtri est essentiel pour assurer la qualité du gisement et un compost qui sera riche en nutriments et sans matériaux nuisibles. Une fois le tri effectué, les éléments sont broyés avec du bois et sont mis dans la machine que vous voyez en rouge (diapo page 6). Ce sont des bennes de maturation où le compost fait son travail. Je tiens à préciser que notre compost est normé NFU 44051, c’est-à-dire qu’il est utilisable en agriculture biologique.

Pour vos territoires, si c’est un schéma de déploiement qui vous intéresse, il faut bien comprendre qu’en général nous commençons toujours par exister sur des micro-sites d’une capacité de traitement de 30 tonnes et souvent dans des friches. Sur la photo que vous voyez, (diapo page 7) le site est déployé à Lille au cœur d’un quartier en pleine restructuration. Démarrer par de petits sites, cela permet souvent de professionnaliser les métiers du compost, d’être une vitrine sur ces questions de tri des déchets et ainsi de commencer à agréger plusieurs premiers clients un peu « symboliques ». Cette collecte se fait en général à vélo et nécessite peu d’investissements en amont. L’objectif est ensuite de monter en charge progressivement et d’être capable de dégager suffisamment de revenus récurrents pour pouvoir installer un site plus grand où le besoin de capital est plus important. Notre modèle consiste à essaimer sur plusieurs sites, sur chaque territoire, pour pouvoir être capables de capter et de produire un montant significatif de biodéchets.

Il y a plusieurs modalités de développement des antennes Alchimistes. Nous sommes souvent sollicités par des acteurs publics, des collectivités ou par des acteurs privés qui se demandent comment ils peuvent agir à leurs échelles. Ils ont souvent déjà identifié des personnes prêtes à valoriser leurs biodéchets, et donc de potentielles sources de revenus ou encore des terrains pour déployer des sites de compostage. Dans ces cas-là, nous avons l’habitude d’accompagner les collectivités ou les acteurs privés qui sont à la recherche de ce type de solutions en faisant soit des études de gisement, ou via de l’accompagnement à la maîtrise d’ouvrage pour installer des sites et optimiser leurs collectes. Mais il y a aussi le cas d’un porteur de projet, c’est-à-dire un individu, qui nous contacte et qui nous dit qu’il a envie de vivre une aventure entrepreneuriale autour des biodéchets et qu’il se reconnaît dans les valeurs des Alchimistes. Dans ce cas-là si on se rend compte qu’il y a un potentiel sur le territoire, comme ce qui s’est passé à Marseille ou à Toulon, et en même temps un potentiel de collaboration avec le porteur de projet, nous commençons à discuter, à échanger les bonnes pratiques, et peu de temps après, l’antenne Alchimistes se crée naturellement.

Certains auditeurs posent des questions, auxquelles je propose de répondre :

  • Les bennes de maturation sont-elles sources de nuisances olfactives ?

En fait c’est tout l’enjeu du compostage. Il peut y arriver parfois qu’il y ait des odeurs en été, mais si c’est le cas c’est que nous avons raté la recette, qu’il y a eu un mauvais mélange entre la matière organique et le bois. Normalement, ça n’est pas censé arriver. Par ailleurs, nous avons aussi très peu de nuisibles, les seuls que nous avons eu ce sont des chats venus récupérer un peu de nourriture. Nous faisons extrêmement attention à la propreté de nos sites qui sont d’ailleurs tous dotés d’un agrément sanitaire. Cet agrément implique que nous devons être très vigilants, étant que donné que nous parlons de déchets alimentaires et que, sur nos sites, on traite tout type d’aliments, y compris les sous-produits animaux. Jusqu’à présent l’odeur n’a jamais réellement été une contrainte et c’est pour cela que l’on peut s’installer relativement proche des zones habitables.

  • Les nouveaux matériels utilisés par les Alchimistes fabriqués en France limitent les nuisances. Est-ce que c’est parce qu’elles ont été trop importantes avec les matériels précédents ?

On n’utilise pas de nouveau matériel de surtri en réalité. En réalité, nous avons testé le composteur électromécanique et l’utilisons encore sur certains de nos sites. Cet outil est très pratique sur les sites qui gèrent un flux régulier de biodéchets, notamment pour les petits sites de 30 tonnes. Dès lors que l’on a un flux plus important et plus difficilement contrôlable, le composteur électromécanique n’est pas forcément la solution à privilégier parce que l’arrivée des biodéchets peut parfois bloquer les pales. Donc, nous utilisons différentes technologies en fonction des caractéristiques des sites.

  • Une question sur les proportions BRF (Bois Rameaux Fragmentés) ?

On utilise une répartition d’1/3 – 2/3. Si vous êtes intéressés par ce sujet, nous organisons des sessions dans lesquelles on rentre beaucoup plus dans le détail sur notre modèle de développement, sur la méthode Alchimistes, sur notre pratique de compostage et sur les modalités qui sont induites en cas de création d’une activité de valorisation de biodéchets sur votre territoire. Si cela vous intéresse, il vous suffit d’aller sur notre site internet et vous y trouverez toutes les informations pour participer à une session. L’idée, c’est de vraiment comprendre que l’on est un réseau avec beaucoup d’expérience. De ce fait, nous commençons à avoir de plus en plus d’accords-cadres qui permettent notamment de faciliter grandement l’implantation d’une solution sur votre territoire.

  • La durée de maturation pour arriver au compost ?

Il faut compter un peu moins de deux mois. En fait, en broyant, on accélère le procédé et on utilise soit un composteur électromécanique qui accélère la dégradation de la matière, soit des baies à aération pilotée. Dans le second cas, il faut imaginer des baies toutes simples dans lesquelles on amène de l’air et on contrôle l’arrivée de l’oxygène pour dégrader la matière, ce qui permet d’accélérer cette dégradation.

Pierre Massis : Modérateur

Merci beaucoup Mme Desal, merci d’avoir aussi répondu aux questions du chat. Ce que j’aime beaucoup dans votre présentation, c’est cette capacité des Alchimistes à développer une franchise. C’est à dire que vous êtes disponibles, qu’un acteur privé ou public peut vous contacter, mais c’est aussi le cas pour un porteur de projets qui peut vous appeler et vous proposer de travailler sur votre solution, qui, si j’ai bien compris, n’est pas si chère que cela puisque du coup la vente du produit vous permet d’équilibrer votre balance commerciale.

Pour prendre connaissance de la présentation PPT de F. Desal, c’est par ici