2° webinaire Réseau-Euroméditerranée : “Regards croisés entre acteurs de la ville méditerranéenne” (2/4)

2° webinaire Réseau-Euroméditerranée : “Regards croisés entre acteurs de la ville méditerranéenne” (2/4)

2° webinaire Réseau-Euroméditerranée : “Regards croisés entre acteurs de la ville méditerranéenne” (2/4) 1022 766 Mediterranean Urban Planners Network

Le 1er avril dernier, le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée et Euroméditerranée ont organisé leur second webinaire de la série 2021-2022 intitulée  « Regards croisés entre Acteurs de la ville méditerranéenne».

Nous vous présentons aujourd’hui la seconde intervention :

Géraldine Lorenz : Nice Ecovallée

Nous avions fait une première session en novembre pour expliquer chacun des référentiels. Aujourd’hui, nous nous focaliserons sur le retour d’expérience de notre référentiel environnemental propre à l’EPA de Nice Ecovallée. Celui-ci existe depuis 2012, ce qui nous permet d’avoir un certain recul sur nos bonnes pratiques et nos projets d’aménagement, recul que nous avons le plaisir de partager,

Ce référentiel a été créé avec la volonté d’être adapté aux spécificités du territoire de l’Opération d’Intérêt National (OIN), soit 10 000 hectares. L’un des objectifs de l’EPA consistait à faire en sorte que l’opération Ecovallée soit un modèle « vitrine » du développement éco-durable. C’est pourquoi le référentiel avait pour but d’énoncer une stratégie valorisant la qualité environnementale. L’objectif visait à fixer un cadre opérateur tout en respectant l’économie des projets, puis de favoriser l’atteinte de performances environnementales exemplaires.

Ce référentiel s’applique aujourd’hui sur plus de 160 opérations. En 2012, il était obligatoire pour les projets d’aménagements urbains dont l’EPA avait la maîtrise d’ouvrage, et s’appliquait sur la base du volontariat sur le reste de l’OIN. 2019 témoigne d’une grande avancée : le référentiel devient obligatoire pour tous les projets de construction neuve situés dans l’OIN et prévoyant une surface de plancher supérieure à 500m². De ce fait, les projets appliquant le référentiel se sont multipliés, ce qui a conduit à de légères adaptations dans la méthodologie d’application.

La méthode d’application concerne ici les projets de nos zones d’aménagement concertés. Lorsque l’EPA lance un appel d’offre, il s’agit dans un premier temps d’imposer, dès la phase concours les exigences environnementales dans les cahiers des charges, puis dans tous les documents contractuels (promesses et actes de vente, règlement de consultation…), ce qui engage officiellement l’opérateur à respecter les clauses. Ensuite, l’opérateur doit valider les exigences aux quatre étapes :

  1. Esquisses ou études préliminaires
  2. Permis de construire ou AVP
  3. Consultation / DCE
  4. Chantier / livraison

Les exigences une fois définies, il s’agit d’identifier les non-conformités et d’examiner le respect des exigences : vérifier dès la phase permis de construire (PC) le respect des taux et seuils fixés, les simulations thermodynamiques respectant ou non le confort d’été, la mise en œuvre de protections solaires adaptées… Les analyses de l’EPA sont ensuite transmises aux services instructeurs de la DDTM. Une fois que les permis de construire sont obtenus, il est plus difficile de vérifier si les exigences sont respectées.

Chaque étape est suivie sur la plateforme en ligne du référentiel. Une fois la phase PC validée, la phase projet DCE (Dossier de Consultation des Entreprises), est examinée afin de s’assurer de l’intégration des exigences environnementales dans l’ensemble des cahiers des charges et des cahiers des clauses techniques particulières (CCTP).

En phase chantier, les bureaux d’études repèrent les non-conformités lors de visites sur sites qui font ensuite l’objet de comptes-rendus. Au moment de la livraison, un bilan établit le respect des exigences, les éventuelles modifications du projet par rapport à la conception et les éventuels problèmes identifiés, ce qui peut donner lieu à des échanges avec maîtres d’ouvrage et bureaux d’études.

En phase d’exploitation, qui permet les retours d’expériences, sont faites des visites sur site des projets afin d’évaluer l’évolution du bâtiment, le fonctionnement des systèmes techniques, la durabilité des matériaux, le suivi des consommations etc… Les discussions avec le gestionnaire du bâtiment et les techniciens font remonter de manière un peu informelle des éléments qui ne sont pas nécessairement répertoriés sur la plateforme. A ce stade du projet, les échanges avec les équipes sont fondamentaux.

Voici maintenant quelques exemples de non-conformité identifiés sur certains projets :

  • en phase PC : constatation de protections solaires non adaptées, de températures de consignes et de simulations thermiques dynamiques non conformes. Lorsque cela ne convient pas, nous échangeons avec les maîtrises d’ouvrage et bureaux d’études ; nous pouvons émettre un avis PC “réservé” jusqu’à ce que le projet mette en œuvre les solutions adéquates ;
  • en phase exploitation (jusqu’à deux ans après la livraison du projet) : constatation de panneaux photovoltaïques non fonctionnels, (parfois dû à des problèmes administratifs ou techniques). Comme il a été dit, les non-conformités ne nous sont pas toujours rapportées de manière formelle, mais plutôt informelle, lors de discussions avec des professionnels de la construction où nous échangeons sur les projets en cours. Un autre problème observé a concerné une façade végétalisée dont la végétation ne prenait pas et ne correspondait pas au rendu prévu.

Dès que le projet est enregistré sur la plateforme, l’opérateur et les bureaux d’études signe un document d’engagement au référentiel. En cas de difficulté, il leur est rappelé qu’ils sont engagés contractuellement et juridiquement. Des pénalités financières sont également intégrées dans les promesses et actes de vente. En effet, en cas de non-respect de l’ensemble des exigences du référentiel un an après la livraison d’un projet, des pénalités de 50€ par m² de surface de plancher peuvent s’appliquer. Ces dernières s’appliquent assez rarement, mais sont plutôt utilisées comme moyen de pression. Il s’avère que le moyen de pression le plus efficace n’est pas tant la pression juridique que la pression financière, notamment sur la possibilité de retenir l’entièreté d’une caution en cas de non-respect des clauses environnementales.

Les échanges très réguliers avec les maîtrises d’ouvrage, architectes et bureaux d’études techniques permettent de mieux appréhender la démarche et d’identifier rapidement les éventuelles difficultés d’atteinte de certains objectifs. Les bureaux d’études ont notamment un rôle primordial dans le respect des exigences puisqu’ils proposent des solutions techniques concrètes et renseignent eux même la plateforme en ligne.

Pour conclure, la réflexion nous a amené vers plusieurs pistes d’évolution pour s’assurer du respect des exigences environnementales que nous imposons : il est tout d’abord nécessaire de discuter avec les opérateurs mais aussi d’effectuer des visites sur sites pour repérer les non-conformités, puisque certaines sont identifiées via la plateforme et les documents officiels mais d’autres sont repérables uniquement sur site ou en discutant de manière informelle avec les opérateurs. Il faut ensuite identifier vers qui se tourner une fois le projet livré (et donc développer un réseau d’acteurs), puisque la maîtrise d’ouvrage n’est plus là et qu’il devient donc plus compliqué d’avoir un interlocuteur.

Pierre Massis : Merci Géraldine. Nous retenons que l’examen des documents initiaux est fondamental, mais le dialogue avec les opérateurs est crucial à ce stade si on veut éviter d’en arriver aux moyens de pression. Aujourd’hui, avec le recul que vous avez, peut-on considérer qu’avec la mise en œuvre du référentiel, il y a un effet d’entraînement global de mieux faire, et, de fait, un impact sur les réalisations ?

Géraldine Lorenz : Oui, avant ce référentiel il y avait déjà des projets qui mettaient en place ces exigences. En revanche, nous constatons aujourd’hui que 60% des 160 opérations n’auraient appliqué aucune exigence environnementale si le référentiel Ecovallée Qualité n’existait pas. Depuis 2019, le Plan Local d’Urbanisme Métropolitain (PLUm) a rendu obligatoire l’application de ce référentiel sur les projets de plus de 500 m² de surface de plancher. Les bureaux d’études et les maîtrises d’ouvrage qui n’avaient pas l’habitude de mettre en place ce type de bonnes pratiques (panneaux photovoltaïques, matériaux bas carbones, etc.) commencent à réfléchir et à se tourner vers plus de solutions vertueuses de ce type. Il y a également une réelle avancée grâce au référentiel sur la thématique du confort d’été, puisqu’on fixe des ambitions de plus en plus élevées. Nous voyons notamment apparaître de plus en plus de projets adaptés au climat méditerranéen (protections solaires type persiennes, enveloppe performante, structure à forte inertie, etc…). Une thématique mieux intégrée dès la conception d’un projet. Ainsi, des exigences environnementales élevées permettent de faire évoluer les projets et la manière de faire de l’ensemble des acteurs de la chaîne (promoteurs, architectes, etc.) vers des pratiques plus éco-exemplaires.

Pour découvrir la présentation de Géraldine Lorenz, c’est par ici