7° webinaire Réseau-Euroméditerranée : « Densités urbaines en Méditerranée » (5/5)

7° webinaire Réseau-Euroméditerranée : « Densités urbaines en Méditerranée » (5/5)

7° webinaire Réseau-Euroméditerranée : « Densités urbaines en Méditerranée » (5/5) 1416 1001 Le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée

Cette dernière chronique vient conclure à la fois le cycle de 7 webinaires « Regards croisés entre acteurs de la ville méditerranéenne » qui se sont  tenus à partir de novembre 2021 jusqu’en novembre 2022 et le webinaire  du 23/11 qui traitait des densités urbaines en Méditerranée.

Nous vous rappelons une dernière fois qu’il vous est possible de retrouver l’intégralité des échanges de ce webinaire (des précédents et des suivants) sur la chaine You Tube du Réseau des Aménageurs de la Méditerranée. Le webinaire du 23 novembre est à retrouver en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=5EWUH4q3hm4&t=4s

Echanges conclusifs du webinaire 7

Charles André : La densité est une conséquence des projections que nous allons faire sur la ville. Pour Euroméditerranée, la densité est la conséquence des objectifs de développement urbain, notamment la création de logements, le territoire d’Euroméditerranée ayant été ciblé pour créer des pivots de développement importants. Il y a une réelle réponse au contexte programmatique et aux besoins du territoire. A cela viennent se combiner des problématiques de développement urbain, d’équilibre de projet, comme celui du financement. La densité est une résultante à la fois de cette programmation et des objectifs de rentabilité du territoire, dans le sens où urbaniser le territoire engendre des coûts importants qu’il faut équilibrer. L’État a chargé Euroméditerranée de développer un projet avec peu de revenus et d’aides des collectivités tout en prévoyant son développement futur. Chez nous, la densité est un choix initial, programmatique, mais aussi la conséquence d’une nécessité liée au développement du territoire.

Les acteurs concernés sont toutes les parties prenantes liées au conseil d’administration ou au financement de l’établissement en général, de la partie qui est financée par les collectivités : l’État, les régions, les métropoles, les villes… Ensuite, ceux qui ont un pouvoir d’action plus local, notamment la métropole et la ville dans le cadre de la réglementation urbaine, via le PLU. Sont menés des échanges importants avec les collectivités pour voir comment moduler les densités, comment raccorder les densités prévues par l’EPA de façon à rester cohérent avec le reste de la ville avec des vues et des objectifs de morphologie urbaine donnés par ces différentes collectivités.

Viennent également les acteurs directement concernés : les habitants. Ce sont les usagers qui vont aimer ou subir la densité. Les actions menées modèlent le paysage et suscitent des réactions, comme les tours face à la mer qui peuvent bloquer le paysage ou contribuer à l’usage.  Si on arrivait à grimper sur l’ensemble des toits des tours qui font front de mer, ce serait une réelle valeur ajoutée pour les habitants du quartier.

Enfin, ce sont aussi ceux qui fabriquent la ville à nos côtés, les investisseurs, plus ou moins intéressés par ces densités. Certains promoteurs sont partisans de ces densités et savent faire avec, d’autres choisissent plutôt des îlots moins denses, et seront force de proposition pour construire moins dense et plus bas avec un choix sur le mode de vie qu’ils souhaitent offrir aux futurs occupants des bâtiments publics. 

Youssef Tohme : C’est une question d’expérience. Auparavant, les promoteurs exigeaient à tout prix de la densité, car ils vendaient de la surface. Avec le temps, ils ont commencé à vendre une expérience. Par exemple, il a été proposé une densité de 8 000 pour un îlot à côté de la mer comme à Saint-Nazaire. Suite aux résultats d’une étude de faisabilité, j’ai proposé 5 000 en essayant de valoriser l’expérience, et donc de vendre plus cher car on vit réellement avec la nature. L’intérêt du promoteur est de faire des bénéfices, raison pour laquelle l’expérience différente de la ville interne est valorisée, ce n’est plus seulement une question de surface.

Charles André : Effectivement, nous menons de nombreuses discussions avec les promoteurs sur la manière dont ils ne valorisent que les surfaces bâties et le béton et pas suffisamment ces espaces qui participent à bien vivre la densité sans vouloir à tout prix construire.

Pierre Massis : Il existe bien des protocoles de concertation avec les habitants pour présenter les projets de l’EPA ?

Charles André : La concertation touche davantage les questions d’espaces publics. La relation de l’espace public avec l’espace bâti est davantage gérée par les normes PLU qui sont la conséquence des projections faites antérieurement et pas nécessairement partagées avec la population.

Pierre Massis : Du côté du Studio BELEM, avez-vous cette expérience d’imposer des choses ou avez-vous un cahier des charges extrêmement strict auquel vous êtes obligés de vous conformer ? Avez-vous la capacité de faire évoluer les comportements, les réglementations ou tout autre critère stable ?

Malek Lemseffer : Pour prendre l’exemple du logement, l’expérience représente un intérêt grandissant dans les projets qui sortent. Les promoteurs veulent désormais vendre de l’expérience. Qui dit expérience, dit faire mieux que le voisin, en proposant beaucoup d’espaces complémentaires à l’espace du logement, libres d’appropriation comme des espaces de coworking. Cela contribue à faire évoluer les choses. Au sein même du logement, il a été constaté que les promoteurs dessinent les logements comme ils sont dessinés globalement depuis la Seconde Guerre mondiale : très normés, avec la grande chambre pour les parents, les chambres plus petites pour les enfants, un espace de vie, etc. Ce type de foyer représente un tiers des foyers actuels. Il y a aujourd’hui un riche panel de types de logements qui composent nos sociétés. Les logements ne sont pas vraiment adaptés à cette diversité apportée par les colocations, les familles recomposées, etc. Un promoteur, à l’aide d’un architecte, peut proposer un produit un peu différent qui ne rentre pas nécessairement dans le cahier des charges ou dans les normes. C’est un risque qui vaut la peine d’être pris car on s’adresse alors à un public plus nombreux que le public « classique ».

Edouard Bettencourt : Il ne s’agit alors pas d’aller à l’encontre d’une réglementation contraignante mais de proposer d’autres « produits » (terme employé par les promoteurs pour désigner les projets) innovants, vertueux, modulaires et flexibles.

Pierre Massis : Il y a du travail, mais cela avance, du côté des aménageurs, des promoteurs, des architectes, des urbanistes… de nombreux projets se construisent à plusieurs mains, à plusieurs voies, à plusieurs cerveaux afin de rendre la ville plus accessible.

Charles André : Par ailleurs, les aménageurs ont le droit de faire des îlots démonstrateurs pour tester des solutions proposées. Ils ont également le droit à l’innovation, c’est-à-dire tordre un petit peu les lois nationales pour voir si des dispositifs répondent mieux aux modes de vie des habitants, ce qui pourrait éventuellement amener à une évolution de la réglementation locale voire nationale.