Lecture : « Les nouveaux ksours de la vallée du M’Zab (1995-2016) », thèse de Doctorat de Madame Gueliane Nora

Lecture : « Les nouveaux ksours de la vallée du M’Zab (1995-2016) », thèse de Doctorat de Madame Gueliane Nora

Lecture : « Les nouveaux ksours de la vallée du M’Zab (1995-2016) », thèse de Doctorat de Madame Gueliane Nora 1147 652 Le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée

La veille du Réseau des Aménageurs a permis d’identifier cet article des Cahiers d’EMAM qui présente la thèse de Doctorat soutenue par Madame Gueliane Nora. Celle-ci traite « Des nouveaux ksours de la vallée du M’Zab », sous l’angle de la permanence et des mutations de la solidarité sociale dans leurs réussites et leurs échecs. Cette thèse de Doctorat, sous la co-direction de Maurizio Gribaudi (DR EHESS) et de Alain Mahé (MCF CEMS-EHESS), a été soutenue le 20 juin 2019 à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), Paris.

Elle a pour cadre géographique la vallée du M’Zab, au Sahara algérien, à 600 km au sud d’Alger. Occupée initialement par les Mozabites [Imzabiyen], des Berbères Zénètes de confession ibadite, la région est connue pour ses ksour historiques au caractère architectural et paysager exceptionnel, classés patrimoine mondial de l’Unesco, ainsi que par des institutions propres, promouvant une auto-organisation multiséculaire et une forte solidarité sociale, qui ont joué un rôle primordial dans la survie du groupe et dans la création de « nouveaux ksour ».

« Les nouveaux ksour – des extensions nommées en analogie avec les ksour historiques puisqu’ils s’en inspirent – sont des extensions urbaines dont la construction a été entreprise à partir des années 1990. La vallée en compte six : Tafilelt, Tinemmirine et Tawenza annexés au ksar de Béni Isguen, Tinaâm annexé au ksar de Bounoura, Ioumed au ksar de Melika et Hamrayat à celui d’El Attef. L’idée était née au sein de la communauté elle-même, promue et soutenue par les notables et ensuite par l’État. Il s’agissait de trouver une solution à la crise du logement aussi bien au plan quantitatif que qualitatif. La particularité de ces projets réside dans le rôle joué par la solidarité sociale depuis la naissance de l’idée, le choix de la population, la conception des projets, la gestion du chantier, les montages financiers, jusqu’à la gestion du projet après son occupation. Ma recherche a porté sur les permanences et les mutations qui ont affecté les différentes formes de solidarité sociale qui ont conduit à la réussite des « nouveaux ksour ».

L’objectif de cette thèse est donc d’apprécier le rôle qu’a joué la solidarité sociale dans la création des nouveaux ksour. Un ensemble de questionnements s’imposent : Qu’est-ce que la solidarité au M’Zab et pour les Mozabites ? Comment s’exprime la relation entre des pratiques sociales liées à « la solidarité » et la construction d’un ksar ? Enfin, comment, concrètement, la solidarité sociale a influencé la démarche de la création des nouveaux ksour ?

C’est à travers l’étude des six nouveaux ksour – envisagés essentiellement de façon monographique – que j’ai tenté de répondre à ces interrogations. Ce travail repose à la fois sur une enquête technique conduite en tant qu’architecte et sur des observations anthropologiques et des entretiens réalisés avec différentes personnes : des notables, des administrateurs, des architectes, des promoteurs, des présidents d’associations, ou de simples habitants des ksour et des nouveaux ksour, dans le cadre d’enquêtes de terrain qui se sont déroulées sur trois ans, entre 2014 et 2016. Cette recherche a été menée sur deux terrains : un terrain principal, centré sur les anciens et les nouveaux ksour au M’Zab, et un terrain secondaire, réalisé auprès de la communauté mozabite de Bordj Bou Arreridj, une ville de l’Est algérien – l’objectif de ce terrain secondaire était d’étudier les formes de solidarités mobilisées en dehors du M’Zab.

La thèse est organisée en trois parties, correspondant à trois axes principaux de réflexion. La première – constituée de trois chapitres – a permis de reconstituer une épure de l’organisation du M’Zab et de la société mozabite, en présentant ses différentes composantes physiques, urbaines, humaines et institutionnelles telles qu’on peut les observer de nos jours. Ce faisant, j’ai parfois donné une profondeur historique à certains aspects de façon à souligner des adaptations et des perspectives de changement augurés par les attentes des Mozabites contemporains. Cette première partie constituait en quelque sorte le cadrage indispensable pour comprendre le contexte d’apparition et de réalisation des nouveaux ksour. Pour ce faire, j’ai commencé par examiner la notion et les pratiques de la solidarité au M’Zab, en déployant les divers registres sémantiques dans lesquels elle s’exprime – aussi bien en tamzabt qu’en arabe – et en modélisant ensuite ses différentes formes pratiques. J’ai ainsi pu détailler les diverses formes d’organisation et de pratiques sociales liées à la solidarité en commençant par la solidarité interpersonnelle promue par la morale et la foi, jusqu’à la solidarité institutionnelle encadrée par les différentes institutions de la communauté, en passant par diverses formes d’échanges tels que la twiza et ses variantes dans différents domaines – pratiques du tissage, activités agricoles, twizas pour la palmeraie et les barrages, pour la construction, etc. – qui procèdent indissociablement d’une coopération ou d’une interdépendance fonctionnelle et d’un registre moral proprement dit. »

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