Nous avons le plaisir de mettre en ligne la première partie de la quatrième intervention du webinaire organisé par l’AVITEM et le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée sur la ville méditerranéenne durable – et « désirable », celle de la représentante de l’aménageur Nice Eco-Vallée. En effet, cette intervention étant à la fois très riche et très consistante, il nous est apparu préférable de la scinder en deux parties afin de ne pas perdre de substance en tentant de résumer cette présentation.
Pour rappel, ce webinaire du 16 novembre a été l’exercice d’introduction à la série de webinaires qui va se tenir à partir du 1er avril prochain. Il a permis de commencer à mettre en perspective des référentiels et chartes de la ville méditerranéenne durable portés par des aménageurs méditerranéens, mais aussi par des collectivités publiques et des opérateurs professionnels.
Géraldine Lorenz, Chargée de Mission Energie & Qualité Environnementale
Je vais vous présenter le référentiel Écovallée Qualité qui existe maintenant depuis 8 ans. L’idée à l’origine de ce projet consistait d’une part à pouvoir disposer d’un référentiel environnemental adapté aux contraintes et aux spécificités du territoire et, d’autre part, à décliner les politiques nationales de développement durable, notamment celles issues du Grenelle de l’Environnement, à une échelle locale. Concrètement, nous souhaitions faire du territoire de l’Éco-vallée, qui est notre opération d’intérêt national (OIN) depuis 2008, un territoire vitrine du développement durable où l’éco-exemplarité est un enjeu prioritaire.
La première justification au lancement de ce référentiel consistait à figer une stratégie de qualité environnementale établie pour l’Éco-vallée. Le référentiel, à travers les différents objectifs fixés, permettait d’accéder à la mise en œuvre de 4 grands actions stratégiques en matière de qualité environnementale :
- parvenir à un territoire neutre environnementalement et sanitairement ;
- favoriser les échanges de flux locaux et optimiser les ressources sur le territoire ;
- assurer une qualité urbaine et architecturale, le développement de la qualité de vie et l’installation d’une mixité, fonctionnelle, générationnelle ou sociale, dans le cadre de nos opérations d’aménagement ;
- déployer l’innovation et l’expérimentation sur le territoire grâce aux différentes exigences posées dans le cadre de ce référentiel.
La deuxième justification visait à définir clairement et précisément des objectifs environnementaux. Il s’agissait de fixer un cadre aux opérateurs, que ce soient les promoteurs immobiliers, les bailleurs sociaux ou les acteurs publics qui développent des projets d’aménagement. On allait donc leur imposer des critères précis en termes de qualité environnementale tout en respectant l’équilibre économique des projets.
La troisième ambition consistait à favoriser l’atteinte de niveaux de performance environnementale exemplaires. Il s’agissait de venir créer une vision commune du développement durable sur le territoire, d’harmoniser les pratiques à l’échelle locale et de créer ce référentiel exigeant et ambitieux qui inciterait tous les acteurs à agir dans la même direction.
La démarche repose sur différents piliers. Elle est gratuite, tout simplement pour inciter le maximum d’opérateurs à l’appliquer, mais aussi compte tenu du fait que la mise en place d’un tel référentiel environnemental va générer des surcoûts. Il s’agit bien sûr de ne pas ajouter de coûts supplémentaires aux opérateurs qui l’appliquent. Ensuite elle est flexible puisque c’est un référentiel qui s’applique sur une opération d’intérêt national qui s’étend sur 10 000 hectares et qui couvre des territoires ayant des spécificités très diverses. En effet, ce territoire est aussi bien composé d’urbain dense que de périurbain ou de rural. Le postulat de base s’appuie sur des exigences à respecter et en parallèle à laisser la possibilité aux opérateurs de s’adapter, ce qui structure le 4ème pilier, fondé sur la négociation : si un opérateur est contraint, de par sa spécificité, à ne pas pouvoir appliquer une exigence, alors il peut compenser en s’appuyant sur une autre exigence ou en étant meilleur sur une autre thématique du référentiel.
Le dispositif se veut évolutif au sens où, élaboré il y a 8 ans, ce référentiel évolue chaque année. À chaque fin d’exercice, nous le mettons à jour puisqu’il prend en compte les exigences et les évolutions règlementaires. Il doit donc se caler à la fois sur la stratégie interne de l’EPA concernant la qualité environnementale, mais aussi sur l’évolution des objectifs nationaux, notamment ministériels comme les indicateurs de développement durable. Enfin, il dépend de la position des acteurs qui l’appliquent : sur ce point, nous faisons référence aux bureaux d’études. Chaque fin d’exercice, nous organisons une réunion de retours d’expérience avec l’ensemble de nos partenaires bureaux d’études, car ce sont ces acteurs qui sont directement impliqués sur l’application de ce référentiel, pour échanger sur ce qui fonctionne ou qui mérite d’être amélioré. Cette démarche est soutenue par l’ADEME. Cette participation de l’Agence nationale est essentielle, en fournissant une subvention qui permet, à travers une convention de partenariat, de suivre les développements des travaux de développement durable portés par l’EPA Eco-vallée.
Je souhaite maintenant faire un petit rappel sur l’Opération d’intérêt national de Nice Eco-Vallée. Son territoire s’étend de l’aéroport jusqu’aux villages de Bonson et de Gilette, soit 23 km du nord au sud et de part et d’autre du Var, d’est en ouest. La volonté initiale a souhaité que ce périmètre soit identifié comme un secteur stratégique à enjeux pour redonner au territoire un dynamisme économique, social et environnemental. Vous pouvez observer celui-ci à l’écran (diapo page 4), ainsi que nos zones d’aménagement concertées (ZAC) qui sont au nombre de 8. Il y a différentes échelles pour appliquer le référentiel, la carte de gauche (diapo page 4) présentant, par collectivités, le nombre de projets qui l’appliquent. Par exemple, sur Nice, il y a 69 projets de cette nature.
Concernant les modalités de mise en œuvre et d’évaluation du référentiel, nous avons identifié deux cas d’application. Depuis sa création, il s’applique de manière obligatoire dans les ZAC. Sur la diapo 5, on peut voir les 4 profils d’application de ce référentiel, qui se définissent en fonction des pourcentages d’objectifs qui sont appliqués. Trois niveaux d’objectifs sont ainsi prévus : les objectifs de niveau 1 sont assez basiques et pour certains règlementaires, tandis que les objectifs de niveau 2 sont un peu plus ambitieux et les objectifs de niveau 3 très ambitieux, voire expérimentaux. Sur nos ZAC, il y a 2 entrées possibles : soit le meilleur niveau, dit excellent, soit le niveau performant qui devra alors être mixé avec un autre référentiel environnemental tel que BDM, HQE, LEED[1], BREEAM[2].
Le deuxième cas d’application concerne l’échelle de l’OIN dans sa globalité. À la création du référentiel en 2013, il n’était pas obligatoirement appliqué sur les opérations en dehors des ZAC, la démarche étant laissée à l’appréciation des opérateurs. Elle est toutefois devenue obligatoire en 2019 avec la sortie du PLU métropolitain, ce qui a imposé l’application du référentiel pour toute opération de plus de 500 m² de surface de plancher. En définitive, c’est une belle victoire pour insuffler cette vision du développement durable à l’échelle de l’ensemble de l’OIN.
Chacune des phases de l’aménagement du projet comprend 4 étapes d’évaluation concernant l’application des objectifs, plus un suivi en phase de fonctionnement : en effet, nous considérons qu’il est essentiel d’avoir le retour d’expérience en phase d’usage afin de savoir si les performances environnementales définies en phase de conception sont toujours applicables et restent avérées.
Le référentiel comporte 8 thèmes :
- Système de management
- Paysage et biodiversité
- Confort, matériaux, risque et santé
- Gestion de l’énergie et du confort thermique
- Gestion de l’eau
- Gestion des déchets
- Mobilité et déplacement
- Gouvernance
Sur la droite de la diapo page 6, vous pouvez voir le type d’objectifs suivis, qualitatifs ou quantitatifs. Ils ont été définis à partir des premières réflexions sur le référentiel en 2010, dans le cadre d’une concertation qui a rassemblé les bureaux d’études, les architectes, les promoteurs immobiliers, les bailleurs sociaux et les différents acteurs publics. Il s’agissait d’identifier, via un diagnostic du territoire, ses enjeux principaux et ses potentiels, notamment en termes d’énergies renouvelables. Une fois le diagnostic posé, nous avons pris comme socle les objectifs nationaux, européens et internationaux, la stratégie de l’EPA en termes de qualité environnementale, le retour d’expérience des différents acteurs et, enfin, la réglementation. Puis nous avons proposé des exigences qui soient légèrement au-dessus de cette dernière. Par exemple concernant l’énergie, nous imposons que 40% des besoins énergétiques soient couverts par les énergies renouvelables. Il est important de savoir que ce référentiel s’applique aussi bien à l’échelle d’un bâtiment qu’à l’échelle d’un espace public, avec cependant des objectifs différenciés.
Une réflexion particulière a pesé sur la méthode d’application du référentiel, et notamment sur la façon de l’imposer. Pour cela, il a fallu identifier 4 grandes étapes. Elles commencent dès le lancement d’une consultation pour un lot ou une phase concours en précisant qu’il s’agit d’un objectif d’entrée pour les opérations qui souhaiteraient s’installer sur le territoire, en référence aux détails du CCTP, le cahier des charges des marchés. En étape 2, ce référentiel est imposé dans tous les documents contractuels que ce soient les promesses de ventes, les actes de ventes, les cahiers de prescription architecturale urbaine et environnementale et les fiches de lot. En étape 3, le référentiel doit être présent dans toutes les phases d’aménagement, c’est-à-dire : conception, permis de construire, projet, dossier de consultations aux entreprises, chantier, livraison, et démarrage de l’exploitation. Il faut noter (diapo page 7) un point d’arrêt en phase permis de construire puisque c’est une phase assez importante : ainsi, on observe qu’une fois que le permis de construire a été délivré, certains opérateurs se relâchent et ralentissent leurs efforts pour appliquer la démarche. C’est ce relâchement qui justifie notre suivi attentif au moment de cette phase. La 4ème étape enfin porte sur le suivi des performances environnementales en phase de fonctionnement, car comme je le précisais, il est essentiel d’avoir le retour d’expérience en phase d’exploitation.
Concernant les outils du référentiel, notre plateforme en ligne recense toutes les opérations qui l’appliquent, avec pour chacune, des opérations, un tableau de bord et une fiche opération. Pour chaque opération, nous disposons de toutes les thématiques et des objectifs auxquels l’opération est soumise : ainsi, les bureaux d’études renseignent la plateforme en ligne et confirment que les exigences ont bien été respectées. À chacune des phases d’aménagement citées plus haut, une évaluation est réalisée afin de vérifier que l’ensemble des objectifs a été atteint. Pour cela, nous sommes accompagnés par un AMO- qualité environnementale depuis la création du référentiel, notamment pour tout ce qui est expertise technique, vérification des preuves et évaluation des projets. Ensuite, dans le cadre du référentiel nous avons des outils de calcul qui stabilisent une base commune fixant des objectifs chiffrés et quantitatifs : ici, la volonté consiste à déterminer un socle partagé par l’ensemble des opérateurs. Nous mettons également en place un ensemble de liens et de connexions permettant aux opérateurs d’alimenter une base de données sur la façon de mieux respecter les objectifs, notamment la biodiversité, l’énergie, les matériaux… Ces outils renvoient par exemple à des documents sur les dispositifs d’éclairage à utiliser pour ne pas gêner la biodiversité ou encore à des méthodes pour comprendre comment intégrer les énergies renouvelables dans les projets.
[1] Le système LEED, pour « Leadership in Energy and Environmental Design ») est un système d’évaluation reconnu comme la marque internationale d’excellence pour les bâtiments durables dans plus de 132 pays.
[2] Le BREEAM (« Building Research Establishment Environmental Assessment Method ») est un standard de certification britannique relatif à l’évaluation environnementale des bâtiments. C’est la certification la plus répandue à l’international.
La référence au diaporama de Madame Lorenz est annoncée en plusieurs passages de ce texte. Pour le retrouver en intégralité, c’est par la