Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (6/13)

Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (6/13)

Webinaire 3 : Les déchets en Méditerranée, résilience urbaine et solutions innovantes – AViTeM (6/13) 821 616 Le Réseau des Aménageurs de la Méditerranée

Nous poursuivons la mise en ligne des intervenants du troisième webinaire dédié aux ressources en Méditerranée. La thématique que nous avons décidé d’explorer concerne un sujet très problématique en Méditerranée, celui des déchets.

« Les déchets, une ressource ? » Si l’affirmation n’est pas immédiatement évidente, nous allons voir pourquoi et comment les intervenants de ce troisième webinaire, qui s’est tenu le 3 juin dernier, soutiennent cette position.

Pour mémoire, le webinaire du 3 juin est le troisième d’une série de quatre, destinés à traiter de la rareté de ressources emblématiques de la Méditerranée, mais aussi des solutions, traditionnelles comme innovantes, qui s’appliquent à la recherche, à la conservation et à une gestion optimisée de celles-ci.

Voici la sixième contribution :

Intervention de Mustapha Tellai : Secrétaire général de la fondation Amidoul, Ksar Tafilelt

Bonjour à tous

Tafilelt Tajdit, pour les gens qui l’ignorent, c’est un ksar situé à Ghardaïa, à 600 km au sud d’Alger en Algérie, et donc en plein désert. La région du M’zab est une région très riche par sa tradition, par son organisation sociale unique et Tafilelt Tajdit s’est beaucoup appuyé sur cette richesse et ce patrimoine pour se constituer. Tafilelt Tajdit a été créé en 1997, bâti par la fondation Amidoul, en collaboration avec la société civile, les bénéficiaires et avec les enfants de la cité. On a essayé de reprendre des choix architecturaux déjà effectués par nos ancêtres tout en les modernisant, et en parallèle, nous avons cherché dans le passé des réponses aux enjeux actuels et futurs. L’un des problèmes majeurs est celui des déchets, qui est de plus en plus persistant.

Je vais commencer par quelques chiffres que j’ai trouvés au cours de mes recherches. A l’université de Ghardaïa, une thèse a été réalisée sur la gestion des déchets dans la ville. Elle précise notamment l’évolution du volume de déchets par an entre 1980 et 2015 : celle-ci est passée de 0,5 kg par jour et par habitant à 1,2 kg par jour et par habitant. Bien sûr, c’est beaucoup moins important que les volumes que vous avez mentionnés tout à l’heure concernant le territoire français. Cependant on remarque la croissance constante de ces chiffres, ce qui doit nous inviter à trouver des solutions dès maintenant face à cette hausse constante. Au niveau de la composition des déchets, 70% sont de la matière organique, 10% du plastique, 9% du carton et 9% est classé dans « autres ». Vous remarquerez que 70% de matière organique, c’est conséquent. Jadis, nos ancêtres généraient quasiment 0% de déchets, étant donné qu’il n’y avait pas de plastique, ni de carton et que la matière organique était parfaitement propice à être réutilisée et recyclée.

Comment essayer de revenir à cela ? C’est-à-dire de revenir à un % de déchets minimal ? Déjà, j’ai été très heureux d’apprendre qu’une des solutions mises en place ici est déjà pratiquée à Marseille par Mr Ducoulombier avec sa poule ! Car autrefois, tout le monde pratiquait l’élevage domestique, chacun avait dans sa maison une chèvre ou une poule qui consommait les restes végétaux et d’aliments et donc les 70% étaient immédiatement « réinvestis ». Cette solution peut-elle être appliquée au 21ème siècle ? Cette question je me la posais avant, avec Mr Ducoulombier je suis maintenant sûr qu’elle est applicable.

À Tafilelt, nous avons des maisons modernes avec du carrelage, l’électricité, alors comment peut-on mettre continuer à bénéficier des « services » d’une chèvre ou d’une poule à l’intérieur d’une maison moderne ? Cette question s’est beaucoup posée. La solution que l’on a trouvée, c’est la constitution d’un éco-parc, d’une ceinture verte qui fait le tour de Tafilelt. Nous avions déjà eu l’occasion d’en parler lors des webinaires sur l’eau et aussi sur l’énergie. Dans cet espace, nous faisons la promotion de l’environnement, de la formation pour les jeunes qui concerne en partie le problème des déchets et du recyclage. Nous y trouvons aussi des plantes médicinales, aromatiques, le tout favorisé par une mini-station de traitement des eaux usées, dont j’avais parlé pendant le webinaire sur l’eau. Et puis il y a aussi un petit élevage, avec comme ide transversale de mettre en place un zoo dit « utile ». Il y a 3 ans, nous avons commencé à travailler avec une vingtaine de familles qui se sont engagées par convention à conserver puis à apporter au zoo pour nourrir les animaux les restes de leurs déchets organiques, qui, comme nous l’avons dit représentent environ 70% de leur poubelle. En contrepartie, périodiquement en fonction des saisons, ils reçoivent un ou plusieurs produits issus de l’élevage, qui a pu être réussi grâce à la réutilisation de leurs déchets : cela peut être des œufs, une poule ou encore quelques pièces de viande de mouton. Les familles se sont engagées par Cette « récompense » permet à la fois de les inciter et de leur montrer le résultat de leur effort de tri. Désormais, le dispositif compte 150 familles. Nous avons aussi démarré il y a 2 ans la production de compost bio pour utiliser la partie des déchets non comestible pour les animaux et ainsi recycler l’ensemble des déchets qui sont de la matière organique produite par les ménages.

Ici, l’orateur présente une petite vidéo d’une minute qui a été réalisée par une chaîne de TV algérienne, et la commente. Nous n’avons pas réussi à obtenir le lien de cette vidéo.

Commentaire de Mustapha Tellaï : c’est une petite introduction sur Tafilelt qui a été sélectionnée car on y découvre son éco-parc. Vous pouvez voir notre ouvrier qui passe pour récupérer les restes et vous remarquez qu’il les apporte vers l’éco-parc pour nourrir les animaux, lesquels vont produire ensuite de quoi nourrir les habitants. L’une des spécificités de cette opération, c’est qu’elle a permis de créer quelques emplois. Lors de la réalisation de ce reportage nous avions atteint les 60 familles concernées par l’action de l’éco-parc.

Dans la même philosophie, depuis 1 an, nous avons lancé un projet en collaboration avec le PNUD Algérie. On recycle déjà comme vous l’avez compris, la quasi-totalité des déchets organiques, mais on essaye désormais de s’attaquer au plastique, au verre et au papier. À l’écran vous pouvez observer une opération très basique pour sensibiliser en priorité les enfants. Après avoir adhéré au dispositif, les enfants savent qu’à chaque fois qu’ils amènent du papier dans un sac, du verre dans un autre, du carton dans encore un autre, ils gagnent un point. Dès que 20 points sont atteints il y a une petite fête avec de l’animation, des boissons et de cette manière on récompense les enfants qui ont atteint le maximum de points. Par ce biais, on incite aussi les parents, que les enfants vont stimuler pour obtenir encore plus de points. Par ailleurs, les enfants sont également sensibilisés à travers des activités dans l’éco-parc. Plusieurs événements sont organisés dans le cadre de programmes sur les déchets et sur le tri. Nous réalisons aussi des campagnes de sensibilisation, en faisant du porte à porte, en distribuant des flyers, tout cela pour essayer de faire de cette opération une initiative autosuffisante et autofinancée. Cette prise en main est( essentielle car le programme du PNUD qui nous soutient actuellement prendra fin dans 1 an, voire 1 an et demi. Il est donc important de réfléchir et d’agir pour pérenniser l’action. Le modèle que nous sommes en train de dérouler s’appuie sur la récolte de ces déchets qui doit servir financer l’opération de façon à s’inscrire dans un cadre circulaire. Ainsi, les financements que nous retirons de l’activité sont directement réinjectés dans le budget de l’opération. De cette manière l’opération est pérennisée.

Le dernier point dont je voulais vous parler concerne un forgeron du ksar. C’est un forgeron artistique qui considère différemment les résidus de métal et autres bouts de ferraille que nous arions directement jetés. Le forgeron y voit des composants pour constituer des œuvres d’art qui sont ensuite exposées à l’éco-parc, toujours avec cet objectif pédagogique d’inciter les gens à recycler.  Comme vous le voyez à l’écran, toutes ces petites statuettes sont fabriquées à partir de ferrailles, ce petit oiseau-là (diapo page 12) vous pouvez y voir des pinces, un roulement de vélo, une coupelle de frein, je vous invite vivement à aller voir sa page Facebook.

Voilà j’arrive à la fin de mon intervention, je voulais simplement venir sur la première diapo et sur une photo en particulier (diapo page 1). Effectivement je suis assez d’accord avec le fait que « l’école constitue le centre du village », même si nous à Ghardaïa nous avons deux centres, l’école et la mosquée. D’une part les enfants et leurs parents, et d’autre part les hommes de la religion et c’est vrai que nous travaillons beaucoup avec ces deux typologies d’acteurs.

Merci pour votre attention.

Pour prendre connaissance de la présentation PPT de M Tellaï, c’est par ici