Article de « Envies de ville » by Nexcity
Entre crise sanitaire et climatique, la filière logement innove pour améliorer la résilience des bâtiments, accélérer la transition énergétique et répondre aux nouvelles attentes des populations.
Alors que les effets du réchauffement climatique deviennent plus concrets année après année, les villes font face à une série de défis inédits. L’augmentation des températures, l’intensification des canicules, la multiplication des îlots de chaleur, l’aggravation du stress hydrique et la raréfaction des ressources alimentaires vont considérablement dégrader la qualité de vie dans les métropoles, et ce dans un avenir proche.
À l’autre bout du spectre, la pandémie a fait naître de nouvelles attentes chez les citadins. Selon un sondage réalisé fin 2022 par Opinion Way, 69 % des Français plébiscitent désormais une ville décarbonée et reconnectée avec la nature1. Aujourd’hui, municipalités, urbanistes et acteurs territoriaux prennent cette problématique à bras-le-corps pour proposer de nouvelles solutions de construction et d’aménagement, faisant ainsi apparaître une nouvelle façon de penser l’habitat. À quoi ressemblera le logement de demain ?
Toujours plus de nature
Pour résister au choc climatique, les métropoles font le choix de la végétalisation, avec de nombreux avantages à la clé… Amélioration de la qualité de l’air, absorption du CO2 présent dans l’atmosphère grâce à la photosynthèse des plantes, limitation des îlots de chaleur, régulation thermique des bâtiments… À Paris, la mairie applique le plan « Biodiversité 2018-2024 », qui vise à multiplier les espaces verts et à créer des sites protégés pour la faune et la flore. D’après le portail interministériel biodiversite.gouv.fr, 40 % de la surface des 28 villes françaises comptant plus de 200 000 habitants sont désormais dévolus à la nature… ou le seront bientôt.
C’est la direction que la métropole de Lille a également choisi de prendre. Dans son nouveau Plan local d’urbanisme, la municipalité compte favoriser le développement de la végétation dans l’espace public, sur les façades ou les toitures, pour répondre aux enjeux du climat et offrir un cadre de vie plus sain aux habitants.
Ce retour du végétal en ville fait du bâtiment un acteur à part entière de la transition écologique. À Paris, la Villa M, entièrement végétalisée, a été pensée pour être un piège à carbone et un levier pour réintégrer la biodiversité en ville.
Les différents confinements ont eux aussi contribué à cette reconnexion avec la nature. À Rennes, le Plan local d’urbanisme intercommunal impose, depuis le 12 janvier 2023, que chaque nouveau logement situé dans un immeuble collectif soit doté d’un espace ouvert vers l’extérieur, balcon, terrasse, loggia ou jardin.
Construire autrement
Pour autant, la renaturation n’est qu’une partie de l’équation écologique, car l’innovation architecturale pousse également un cran plus loin le curseur de la décarbonation. À Lyon, un bâtiment révolutionnaire, sans chauffage ni climatisation, sortira de terre en 2025 dans le quartier de La Confluence. Construit avec une enveloppe ultra-isolante composée d’une double rangée de briques de 30 centimètres d’épaisseur, équipé de fenêtres à triple vitrage, piloté par un logiciel qui régulera la ventilation, cet immeuble bioclimatique, baptisé Essentiel, garantira à ses occupants des températures comprises entre 22 °C et 26 °C, hiver comme été, tout en ne consommant pas plus de 2 kWh par m2 et par an.
Si les procédés bioclimatiques ne cessent de gagner en efficacité, le réemploi devient lui aussi un moyen pour accélérer la neutralité. En Seine-Saint-Denis, le Village des athlètes, qui accueillera à l’été 2024 les délégations sportives participant aux Jeux de Paris, a été pensé pour être « réversible ». Une fois les compétitions terminées, les bâtiments seront transformés et livrés en héritage aux futurs habitants.
Sobriété foncière
Autre défi de taille, il est devenu nécessaire de freiner l’extension des villes afin de préserver au maximum les écosystèmes et les terres agricoles. À ce titre, l’objectif du Zéro artificialisation nette (ZAN), fixé à l’horizon 2050 par la loi Climat et Résilience, demande d’ores et déjà aux territoires de réduire de 50 % le rythme de consommation des espaces naturels d’ici 2030. Et ce, alors même que le manque de nouveaux logements est criant partout en France.
Pour lutter contre l’étalement urbain et répondre à la pénurie foncière, la métropole de Lyon mise sur la surélévation des bâtiments. L’actuel PLU prévoit, en effet, l’élévation de 35 bâtiments, ce qui permettra de créer 250 nouveaux logements sociaux. À Saint-Didier-au-Mont-d’Or, un bâtiment HLM de deux étages a ainsi été doté de deux étages supplémentaires en construction bois, doublant la surface habitable. « Ce mode de construction vertueux permet de densifier de manière raisonnable sur des projets de faible hauteur, en s’adaptant au contexte urbain », explique Renaud Payre, vice-président au logement de la Métropole de Lyon, à France 3 Régions.
Même son de cloche à Paris, où le futur PLU autorise désormais la surélévation quand elle est en faveur du logement. « Nous allons autoriser des dérogations sur l’ensemble des règles qui encadrent les hauteurs du bâti, s’il s’agit de faire de l’habitation », déclare Stéphane Leclerc, directeur de l’urbanisme de la Ville de Paris, lors de la présentation du PLU parisien au Pavillon de l’Arsenal en juin 2022.
Toutes ces évolutions laissent entrevoir un logement très différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. À la fois végétalisé, circulaire, recyclable, ouvert sur l’extérieur, il prendra corps dans une ville elle-même profondément transformée, plus verte, plus sobre et plus durable. C’est un nouveau chapitre de l’habitat qui s’ouvre indéniablement.
- Sondage OpinionWay pour « Les Echos » et Euroméditerranée du 29 novembre 2022