Dans la continuité de ce que nous vous avons présenté lundi, nous avons le plaisir de vous communiquer la suite des propos échangés lors du dernier webinaire de la série « Regards croisés entre acteurs de la ville méditerranéenne ». Ce webinaire, qui s’est tenu le 23 novembre 2022 traitait de la thématique suivante :
« Densités urbaines en Méditerranée »
Nous vous rappelons qu’il vous est possible de retrouver l’intégralité des échanges de ce webinaire (des précédents et des suivants) sur la chaine You Tube du Réseau des Aménageurs de la Méditerranée. Le webinaire du 23 novembre est à retrouver en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=5EWUH4q3hm4&t=4s
Malik Lemseffer et Edouard Bettencourt, architectes et fondateurs du Studio BELEM
1/ Malek Lemseffer : Composer des densités urbaines habitables et désirables en Méditerranée
La Médina, un modèle urbain d’avenir ?
Au sud de la Méditerranée, quelques siècles en arrière, s’est imposée la Médina : un modèle durable qui a pérennisé en gardant son identité malgré les conquêtes et les vagues de colonisation. Cette forme urbaine se trouve au Maroc, au Maghreb, mais aussi en Espagne et au Portugal. Elle a été un rempart marocain lors des périodes coloniales permettant aux populations locales de pérenniser et de garder leurs identités jusqu’à aujourd’hui. Cette forme urbaine a été un rempart protecteur de certaines valeurs, d’un artisanat, d’un savoir-faire qui a perduré.
La Médina de Fès accueille 3 000 habitants/hectare tandis que Paris recense 250 habitants/hectare. C’est un modèle de densité qui fonctionne très bien. Il monte moins haut que Paris, les rues sont plus étroites engageant une circulation piétonne qui a une réelle valeur à l’heure où on parle de plus en plus de piétonisation et où la voiture aura de moins en moins de place dans les sociétés futures. Cette forte densité est donc permise d’abord par des rues étroites et des bâtiments introvertis, supprimant la voiture dans notre manière de réfléchir la ville. En diminuant la pollution (sonore, etc.), elle s’inscrit dans des valeurs écologiques et se révèle un modèle d’architecture bioclimatique vertueux, notamment à travers les riads qui sont un modèle de maison des classes les plus aisées. Il existe trois ou quatre autres modèles qui sont introvertis avec le patio, le point d’eau et la végétation que l’on retrouve au centre. Il existe d’autres typologies telles que la masria qui répond à des classes plus défavorisées.
L’épaisseur des murs permet de réguler la température en été comme en hiver. La disposition des ouvertures et des fenêtres sur l’extérieur permet d’utiliser les pièces autour du patio différemment selon la saison. Certaines pièces sont utilisées en hiver car exposées de manière à avoir plus de chaleur, et l’inverse en été avec des pièces plus rafraîchies, de sorte à rendre ces bâtiments pleinement fonctionnels. La végétation et les points d’eau régulent l’humidité au sein des maisons et apporte de la fraicheur en été.
La Médina répond à un urbanisme social, pas du tout ségrégatif. Se balader dans les rues de la Médina ne permet pas de voir, de l’extérieur, si ce sont des logements de familles aisées ou modestes. Les logements se jouxtent et se côtoient les uns les autres. Cette humilité de l’architecture ne permet pas de savoir à quelle classe sociale on s’adresse, toutes mélangées au sein de cet ensemble urbain.
Le modèle urbain de la Médina est également un lieu de rencontre et de brassage, comme la mosquée, le hammam, le four traditionnel qui existe encore et où l’on vient faire cuire ses plats ou son pain, la place de marché (la plus connue étant la place Jemaa el-Fna), etc. La densité n’est possible que si une réelle mixité est mise en place. Cela passe par une mixité programmatique : différents programmes de travails, d’habitations, de commerces, lieux de cultes, etc., mais aussi par une mixité sociale et intergénérationnelle au sein d’un lieu assez contraint.
La Médina est ceinturée de remparts qui ont permis de se protéger dans un premier temps, mais aussi pour permettre aux terres agricoles autour de la Médina de continuer à exister en évitant un urbanisme galopant.
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